Dans un entretien accordé au journal français L’Express, le président Macky Sall a affirmé que « sur le plan juridique, le débat est tranché depuis longtemps ». Selon le Chef de l’État, le Conseil Constitutionnel a jugé que le « premier mandat était intangible et donc qu’il était hors de portée de la réforme ». Un argument contesté par le leader du mouvement AGIR, Thierno Bocoum, dans une contribution publiée dans le journal Le Témoin. L’ancien lieutenant de Idrissa Seck considère qu’en « ne faisant pas la différence entre le nombre de mandats et la durée de mandats », « le président Macky Sall entretient l’amalgame ». Ce qui pourrait permettre, selon lui, de « justifier que sa candidature dépendrait de sa simple volonté parce qu’ayant déjà obtenu l’onction du Conseil constitutionnel depuis 2016 ».
Pour démonter cet argument, Thierno Bocoum rappelle les décisions prises en 2016 en affirmant que « le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la durée du mandat qui était l’objet de la réforme constitutionnelle et non sur le nombre de mandats ». « Le conseil constitutionnel s’est effectivement prononcé sur la réduction de la durée du mandat dans sa décision du 1er avril 2016. Il avait pris deux décisions sur cette durée : il avait avalisé la réduction du mandat présidentiel de sept à cinq ans, prévue par ce projet de révision ; et avait considéré que la disposition prévoyant l’application de cette réduction au mandat en cours devait être supprimée, au motif que « le mandat en cours au moment de l’entrée en vigueur de la loi de révision, par essence intangible, est hors de portée de la loi. »
Thierno Bocoum considère que l’article 27, libellé ainsi, « Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs », est un verrou. Il ajoute que « la question du nombre de mandats n’a jamais fait l’objet d’une décision chez le juge constitutionnel. Il a été consolidé en 2001 et renforcé en 2016 dans la charte fondamentale de notre pays ». « Or, la question de la candidature du Président Macky Sall relève de la problématique du nombre de mandats. Si le juge constitutionnel devait traiter d’une manière indissociable la durée et le nombre, il faudrait une décision dans ce sens qui n’a jusque-là pas encore été prise. Donc, contrairement aux affirmations du président de la République, le débat n’est pas encore tranché sur le plan juridique » a-t-il estimé.
En plus de l’argument juridique, le leader du mouvement AGIR évoque une dimension morale de la question. Il rappelle : « A la mythique phrase du président Wade « Ma waxone Waxete », le Président Macky Sall avait opposé le « wax jëf ».
Thierno Bocoum estime donc que le president, n’étant pas « contraint à se présenter à une élection sur la base d’une décision quelconque du juge constitutionnel sur le mandat », « doit par conséquent respecter sa parole en appliquant le « wax jëf » qu’il avait vendu à ses compatriotes ».