Rupture d’antidiabétiques : Un vaste trafic à l’origine de la perturbation

Depuis quelques semaines au Sénégal, les pharmacies connaissent de récurrentes ruptures de médicaments antidiabétiques. Paradoxe : selon de nombreux délégués médicaux, le pays est correctement approvisionné pour ce type de médicament. Le problème se situe ailleurs : l’appât du gain facile.

En effet, des commerçants peu scrupuleux ramassent en toute vitesse les stocks d’antidiabétiques pour aller les commercialiser dans les pays de la sous-région, au Mali, en Guinée, au Burkina Faso et au Niger.

Si ce commerce fait florès, c’est que deux facteurs sont réunis : les médicaments en question, qui y sont très demandés, coûtent cher dans ces pays et, surtout, l’État du Sénégal les subventionne pour faciliter l’accès aux soins aux malades pour lesquels ces produits sont prescrits à vie.

Les bénéfices peuvent représenter le double, voire le triple, des montants investis. Exemple : les Mixtard, qui sont vendus au Sénégal à 1000 francs Cfa l’unité (prix subventionnés), coûtent entre 2500 à 3500 au Mali et 2000 à 3000 en Guinée. Les mêmes marges affolantes sont obtenues pour les autres antidiabétiques comme les Insulatard et les Actrapid, disponibles dans les pharmacies au Sénégal pour 990 et 950 francs Cfa, respectivement.

Le mode opératoire des trafiquants est rodé. Ils se scindent en plusieurs groupes pour prendre d’assaut les pharmacies. Au niveau de chaque point, ils achètent à tour de bras les médicaments, gonflant certes les chiffres d’affaires des officines, mais grevant les finances publiques. Sans compter le préjudice causé aux malades sénégalais, qui sont ainsi exposés à des risques de pénurie.

« Mon établissement est resté longtemps confronté à une pénurie d’insuline, surtout les Mixtard, très prisés par les malades », s’alarme N. S., pharmacienne installée à la Sicap Liberté 6. Elle interpelle le ministère de la Santé sur ce trafic contrôlé, d’après les témoignages, par des étrangers.

En attendant une réaction de l’État, certains pharmaciens s’organisent comme ils peuvent. « J’ai convoqué tous mes agents de comptoir pour leur demander fermement de ne plus vendre plus de deux boîtes d’insuline à un même client », confie N. S.

Pharmacien établi à Sacré Cœur, Dr M. S., lui, « renvoie tout client suspect désirant acheter plus de deux boîtes d’insuline ». Cependant, il regrette que l’Ordre national des pharmaciens « n’ait fait aucune note d’information pour sensibiliser les confrères sur la présence massive de ces drôles de clients étrangers qui achètent des médicaments antidiabétiques en grandes quantités dans nos officines ».

 

Le Témoin

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