Depuis quelques jours, un drôle de véhicule arpente les rues de Mountain View, en plein cœur de la Silicon Valley. Avec son petit gabarit, ses formes arrondies et ses allures enfantines, il semble tout droit sorti d’un dessin animé. Il présente aussi une autre particularité: il est totalement autonome. Il s’agit en effet du premier prototype de voiture sans conducteur entièrement conçu par Google.
Cela fait déjà cinq ans que l’entreprise mène des expérimentations en Californie et dans le Nevada. Mais jusqu’à présent, elle n’avait utilisé que des modèles commerciaux, des Toyota puis des Lexus. Ces voitures sont équipées d’un système sophistiqué de radar et de caméra. Celui-ci permet de cartographier l’environnement et de détecter voitures, piétons, feux rouges, lignes blanches…
Le nouveau prototype de « Google car » a été développé en interne. Une vingtaine d’unités ont été produites par un petit équipementier de Detroit, le fief américain de l’automobile. Initialement, ces voitures ne devaient inclure ni volant, ni pédales. Google a cependant dû revoir ses plans pour se conformer à la réglementation californienne, qui impose la présence d’un chauffeur pouvant reprendre le contrôle.
11 ACCIDENTS
Dévoilé en mai 2014, le prototype – qui n’a officiellement pas de nom – a déjà accumulé les kilomètres d’essais sur des pistes privées. La deuxième phase de tests se déroule désormais sur les routes publiques à proximité du siège social du moteur de recherche, à une vitesse maximale de 40 km/h. Ces essais doivent permettre d’améliorer les performances en ville, un environnement complexe pour les voitures sans conducteur.
Niché dans Google X, le laboratoire maison qui imagine les concepts les plus futuristes, le projet est encore loin d’aboutir. Son directeur, Chris Urmson, évoque un possible lancement commercial d’ici à cinq ans. Beaucoup de défis restent encore à résoudre, explique-t-il. Par exemple, « où doit s’arrêter la voiture quand sa destination est inaccessible pour cause de travaux ? »
Depuis leurs premiers tours de piste, les voitures de Google ont effectué environ 1,5 million de kilomètres de manière autonome. Sans le moindre accident, expliquait encore la société l’an passé. Début mai, elle a cependant dû admettre que onze accrochages avaient bien eu lieu depuis le début des essais. « Le véhicule sans conducteur n’a jamais été la cause de l’accident », assure M. Urmson.
ENCORE DIX ANS D’ATTENTE ?
Google n’est pas la seule entreprise à s’intéresser aux véhicules sans conducteurs. Mardi 23 juin, Ford a officialisé ses ambitions dans le domaine. « De nombreux constructeurs travaillent sur les voitures sans conducteur, indique Thilo Koslowski, du cabinet d’études Gartner. Mais le développement va se faire par étapes ». L’analyste estime qu’il faudra encore attendre dix ans avant qu’un modèle totalement autonome devienne grand public.
Dans l’intervalle, un nombre croissant de véhicules se conduiront seuls dans certaines conditions. Par exemple, pour se garer ou sur autoroute, où les données à analyser sont moins complexes qu’en ville. Tesla, le fabricant américain de voitures électriques, promet même l’arrivée d’une fonction de pilote automatique dès cette année. De son côté, General Motors prévoit un modèle semi-autonome pour 2017.
« En 2035, les voitures sans conducteur représenteront 9% de la flotte mondiale. Et presque 100 % en 2050 », prédit Egil Juliussen, du cabinet IHS Automotive. Google pourrait devenir un acteur majeur du secteur. « L’aspect logiciel va être un élément primordial pour assurer la fiabilité des véhicules, poursuit l’analyste. Sur ce point, les sociétés high-tech disposent d’une expertise que ne possèdent pas les constructeurs automobiles ».