Jordan Bardella, 28 ans, et tête d’affiche de l’extrême droite française

A 28 ans, Jordan Bardella, toujours plus proche du poste de Premier ministre après le succès de l’extrême droite au premier tour des législatives en France, est parvenu à incarner la stratégie de normalisation de son parti, le Rassemblement national (RN).
 
L’accession à Matignon en cas de majorité absolue semble n’être qu’une « première » de plus pour celui que des proches voient comme le « fils adoptif » de Marine Le Pen, la figure de proue du RN, lui-même héritier du Front national.
 
 
 
« Je serai le Premier ministre de tous les Français », a–t-il déclaré dimanche soir. « Un Premier ministre de cohabitation, respectueux de la Constitution », mais « intransigeant ».
 
 
 
Avec plus de 34% des suffrages, le RN et ses alliés devancent la coalition de gauche du Nouveau Front populaire (28 à 29%), loin devant le camp du président Emmanuel Macron (20-21%) selon les estimations.
 
 
 
Son itinéraire politique a été fulgurant depuis qu’à l’âge de 17 ans, en 2012, il a pris sa carte au Front national, un parti cofondé en 1972 par deux anciens Waffen-SS et le père de Marine Le Pen, Jean-Marie Le Pen, lequel avait alors choisi le même emblème que celui du parti néo-fasciste italien : une flamme tricolore.
 
 
 
En 2019, lorsque Marine Le Pen renonce à mener la liste du RN – qui a changé de nom l’année précédente – aux élections européennes, c’est à cet inconnu qui n’a pas de diplôme excepté le baccalauréat, qu’échoit cette responsabilité.
 
 
 
Arrivé en tête du scrutin devant le camp du président Emmanuel Macron, Jordan Bardella démarre ainsi tambour battant, un dimanche soir de mai 2019, sa carrière politique.
 
 
 
Il entend présenter le nouveau visage d’une extrême droite rajeunie et modernisée : un prénom hérité, comme « Steve » ou « Kévin », des feuilletons télé importés des Etats-Unis dans les années 1990, qu’il décrit comme un « marqueur populaire » ; une enfance dans la banlieue de Paris – entre une mère employée dans une école, qui l’élève, et un père patron d’une petite entreprise, qu’il voit un week-end sur deux ; et un patronyme qui renvoie à l’immigration italienne du XXe siècle.
 
 
 
« Trois de ses quatre grands-parents sont nés » en Italie, un « pays souvent décrit comme un laboratoire politique européen », souligne le quotidien Le Monde.
 
 
 
L’une de ses grand-mères était la fille d’un travailleur immigré algérien qui s’est installé dans la région lyonnaise (centre-est) au début des années 30, selon une enquête de Jeune Afrique publiée lundi.
 
Duo complémentaire
Porte-parole de la troisième campagne aux élections présidentielles de Marine Le Pen en 2022, Jordan Bardella se montre aussi loyal qu’incontournable, et est élu en novembre à la tête du RN, qui n’est plus, à tout le moins officiellement, dirigé par un membre de la famille Le Pen, une première.
 
 
 
Mais c’est bien un « duo complémentaire » que mettent en place le jeune nouveau patron au million et demi d’abonnés sur TikTok, et son aînée Marine Le Pen.
 
 
 
A elle, le discours « ni-droite-ni-gauche » et l’opposition entre blocs « populaire » et « élitaire ». A lui de faire entendre ses nuances, « un peu plus de droite, un peu plus libéral », affirme un député RN.
 
 
 
Le bardellisme est-il un lepénisme ? Les deux récusent en tout cas la moindre divergence, jusqu’à la mauvaise foi.
 
 
 
Lorsque l’eurodéputé se prononce contre les prix planchers agricoles, dans une spectaculaire contradiction avec la doxa du parti, Marine Le Pen défend son poulain, à la stupéfaction des cadres du mouvement.
 
 
 
Et il affirmera que Jean-Marie Le Pen « n’était pas » antisémite, avant de revenir sur ses déclarations, alors que le leader d’extrême droite obsédé par l’immigration et les juifs avait été condamné plusieurs fois pour ses dérapages, qualifiant notamment les chambres à gaz de « point de détail de l’histoire ».
 
 
 
Cela « aurait été compliqué de dire le contraire vis-à-vis de Marine », avaient tenté a posteriori de justifier ses proches.
 
 
 
Qu’importe : Bardella apporte, étude d’opinion à l’appui, un nouvel électorat au socle lepéniste jusqu’alors écrasé par un plafond de verre. Jeunes, cadres, urbains, retraités, toutes les catégories historiquement hostiles au RN offrent peu à peu leur confiance au parti.
 
 
 
Celui qui a fait de sa plasticité presque une doctrine entend s’afficher aussi lisse et brillant que la gomina qui plaque impeccablement ses cheveux en toutes circonstances.
 
 
 
En septembre 2023, Marine Le Pen annonce que si elle accède à l’Elysée, elle fera de Jordan Bardella son Premier ministre.

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