Le Sénégal peut produire 95 % de ses besoins alimentaires et en exporter s’il s’assure de la création d’unités chargées d’offrir des services agricoles aux producteurs, de la ‘’réinvention’’ de ses plats abandonnés et d’un investissement massif dans la recherche et la mobilisation des ressources en eau, déclare l’ingénieur agronome Jean-Pierre Senghor.
‘’En quelques années, nous pouvons produire jusqu’à 95 % de nos besoins et pourquoi pas devenir vite un pays exportateur de produits agroalimentaires’’, assure M. Senghor dans une interview publiée samedi par le quotidien Le Soleil.
‘’Avec 100.000 exploitations familiales gérées par des managers de fermes, des unités mobiles de prestation de services agricoles, en quatre ans nous pouvons réduire de 87 % l’insécurité alimentaire et assurer la souveraineté alimentaire du pays’’, a-t-il soutenu.
L’ingénieur agronome et secrétaire exécutif du Conseil national de sécurité alimentaire du Sénégal recommande aux agriculteurs sénégalais de produire du sorgho, ‘’une céréale africaine’’, du mil, ‘’lui aussi originaire du continent’’, du fonio, ‘’une céréale miracle bien de chez nous’’, et du niébé.
‘’Aidons aussi les privés à doter le pays d’une bonne capacité de transformation en aval de ces productions. Assurons-nous de disposer de bonnes unités de conditionnement et de stockage. Réinventons nos plats abandonnés, pourtant sains et nutritifs. Revisitons nos graines oubliées’’, recommande-t-il.
‘’Faire la part belle aux céréales locales’’
Jean-Pierre Senghor est d’avis que ‘’l’Etat devra prendre véritablement le taureau par les cornes en investissant massivement dans la mobilisation des ressources en eau, l’intrant numéro 1 en agriculture’’. ‘’Sans eau, oublions tout le reste.’’
‘’La recherche est un pilier central, avec des chercheurs qui ont l’obligation de trouver, quitte à aller dénicher partout dans le monde les meilleurs. Il nous faut un institut national de recherche digne de ce nom, avec un budget à la hauteur des ambitions fixées’’, conseille-t-il aux autorités sénégalaises.
‘’Le fait que le chef de l’Etat ait ajouté la souveraineté alimentaire aux missions du ministère de l’Agriculture est une belle opportunité pour notre pays, souligne-t-il. Aujourd’hui que la volonté politique est affichée, rien ne devrait nous retenir.’’
M. Senghor pense qu’une bonne politique agricole est mise en œuvre avec une ‘’stratégie qui implique (…) les chercheurs, les opérateurs privés importateurs et les revendeurs, en faisant la part belle aux céréales locales’’.
‘’La baguette de pain à base de blé, à laquelle nous sommes tous devenus accros, n’est pas une fatalité. Il nous faut une véritable prise de conscience et une mobilisation nationale citoyenne pour y arriver’’, conseille-t-il.