Sur ces images émouvantes, on voit les quatre enfants hagards, tous terriblement amaigris, la plus petite dans les bras de l’un de ses sauveteurs. “Nous avons rencontré les enfants. Merci à Dieu!”, commente l’un d’entre eux, des membres de la garde indigène. L’un chante, un autre fume du tabac (une plante sacrée chez les indigènes) et remercie avec allégresse.
“La fille aînée, Lesly, en tenant la petite par la main, a couru vers moi. Je l’ai prise dans mes bras, elle m’a dit: ‘j’ai faim’”, a raconté Nicolas Ordoñez Gomes, l’un des membres de l’équipe. “J’ai demandé où est le garçon. Il était allongé à côté. Après un premier câlin, et lui avoir donné un peu de nourriture, il s’est levé et il m’a dit, très conscient de ce qu’il disait: ‘ma maman est morte’”.
“Une demi-heure auparavant, on avait trouvé une tortue sur le chemin”, a conté un autre membre de l’équipe. “Dans les croyances de nos anciens, si on trouve une tortue, on peut lui demander un voeu, et ce voeu va se réaliser. Je lui ai dit ‘trouve moi les enfants’, même si on voulait la manger après. Quand on a trouvé les enfants, on l’a balancé, on ne pensait plus qu’aux petits”.
“Nous étions un peu désespérés, car cela faisait trop de temps que nous les cherchions”, a expliqué à l’AFP un autre sauveteur de cette même équipe, Henri Guerrero. Tomber sur eux “a été un bonheur immense”. “Ce qui était admirable, c’est que tous étaient conscients”. L’aînée “se souvenait de tout”. “Ils voulaient manger du riz au lait, du pain. C’était seulement ‘à manger, à manger’. Ils étaient sur une serviette sur le sol, cela faisait quatre jours qu’ils étaient au même endroit (…), ils n’en pouvaient plus”.
Trois jours après ce sauvetage, les enfants continuaient de se reposer, à l’abri des regards et de l’excitation des médias, dans une chambre de l’hôpital militaire de Bogota, où ils ont été transférés par avion le soir-même de leur sauvetage. Ils “parlent peu”, selon leurs proches, mais ont révélé que leur mère avait survécu quatre jours à l’accident d’avion avant de succomber à ses blessures, selon leur père Manuel Miller Ranoque Morales, pour qui les indigènes “ont montré au monde” ce dont ils étaient capables.
“Ils jouent avec les cadeaux (…) ils sont bien, ils sont entre de bonnes mains. (…) On ne peut pas leur donner trop de nourriture pour le moment. Tout ça est un processus qui va prendre du temps”, a commenté leur grand-père. La presse colombienne a commencé à donner des détails de leur calvaire. Les enfants ont pu se servir dans leur périple d’une moustiquaire, d’une serviette, d’un minimum de matériel de camping, de deux téléphones portables (aux batteries rapidement déchargées), d’une lampe de poche et d’une petite boîte à musique.
Après plus d’un mois de recherche infructueuse, l’armée était sur le point de réduire ses moyens déployés. Malgré leurs rations, les commandos des forces spéciales ont perdu chacun entre 3 et 10 kilos, avec des traques quotidiennes épuisantes débutant dès 5H00. “Chaque jour qui commençait, on se disait: aujourd’hui, on les trouve!”, a raconté l’un de ces soldats d’élite, cités par un hebdomadaire. L’armée dit aujourd’hui poursuivre ses recherches de Wilson, un chien de détection perdu dans la jungle. Le nom et les photos de ce malinois de six ans s’affichent désormais aux fenêtres à Bogota.