Amnesty International Sénégal et le Bureau Régional de l’organisation pour l’Afrique de l’ouest et du centre ont procédé ce mardi 28 mars 2023 au lancement du rapport annuel. Ce document fait le point de la situation des droits humains au Sénégal et dans le monde au cours de la période janvier 2022-mars 2023.
»La liberté d’expression a été malmenée au cours de l’année 2022. La situation ne semble guère s’améliorer cette année », a déploré Seydi Gassama. Le directeur de Amnesty International Sénégal regrette que la liberté d’expression ait connu beaucoup de restrictions au Sénégal. Il cite en exemple l’interdiction des manifestations à savoir celles prévues par les forces de l’opposition ou la société civile. »Vous ne pouvez pas vous prévaloir de respecter la liberté d’expression », déclare-t-il à l’endroit de l’Etat du Sénégal. A ce propos, M.Gassama fustige le fait que les préfets continuent à interdire les rassemblements sur des motifs vagues.
Seydi Gassama soutient que le motif de menace de troubles à l’ordre public ne peut être brandi systématiquement. “Le pays dispose d’assez de forces de sécurité pour encadrer ces manifestations. L’Etat a recruté 6000 gendarmes en 2022 et 6.000 autres cette année.’Nous ne pouvons plus invoquer le manque de forces de sécurité pour encadrer les manifestations », estime-t-il.
»La liberté d’expression connaît beaucoup de restrictions »
Le directeur de Amnesty International Sénégal affirme que le pays assiste à une négation d’une liberté fondamentale garantie par la Constitution et dont l’exercice a tendance à être criminalisé.
»La liberté d’expression connaît beaucoup de restrictions », regrette M.Gassama .Il cite pour exemple l’arrestation du député Serigne Abdou Bara Dolly pour des propos tenus dans un meeting, le cas de Papito Kara et Outhmane Diagne détenus pendant plusieurs mois avant de bénéficier d’une liberté provisoire pour avoir été accusés de détourner la Une de certains journaux. Il y a eu également le cas du journaliste Pape Alé Niang “arrêté de façon arbitraire”, selon lui.
Ces exemples font que la situation est »très préoccupante » en ce qui concerne la liberté d’expression. »Cela ne s’améliore pas avec l’arrestation du journaliste Pape Ndiaye .Un simple démenti du Parquet aurait suffi dans n’importe quelle démocratie », juge Seydi Gassama.
»Nous avons l’impression que par l’utilisation du délit de diffamation, de diffusion de fausses nouvelles, le régime veut faire taire toute critique, toute voix discordante », observe M. Gassama.
Le patron de Amnesty International Sénégal révèle qu’il y a toute une brigade qui cible certains activistes, qui fouille sur les réseaux sociaux à la recherche de la moindre déclaration considérée comme une fausse nouvelle, une diffamation, un appel à une insurrection ou une atteinte à la sûreté de l’État, pour les arrêter.
“Recours excessif à la force”
“Cette situation crée une certaine psychose à la limite de l’autocensure”, considère-t-il.
Seydi Gassama dénonce aussi le “recours excessif à la force” qui s’est traduit en juin-juillet 2022 par la mort de deux personnes.
La manière dont le Parquet est instrumentalisé est également jugée inquiétante par Amnesty International.
L’organisation de défense des droits de l’homme dénonce aussi la torture et la maltraitance de François Mancabou et les enquêtes ouvertes sans évolution. »La commission d’enquête promise par le Chef de l’État ne semble plus être à l’ordre du jour, déplore-t-il. Nous allons clairement vers une situation d’impunité et qui est la cause de la répétition des actes de violation des droits humains ».
Amnesty International appelle l’État du Sénégal au respect de ses engagements internationaux.
L’organisation affirme continuer à soutenir les victimes pour qu’elles saisissent les juridictions internationales afin de multiplier les condamnations du Sénégal au niveau international.
La modernisation des daaras, le respect des droits et la dignité des enfants talibés, l’amélioration du système de santé ont aussi été passés en revue.