Le ministre de l’Agriculture, de la Souveraineté Alimentaire et de l’Élevage, Mabouba Diagne, a effectué une visite à Bignona, dans la région de Ziguinchor, ce lundi 24 mars 2025, pour constater les problèmes liés au barrage d’Affiniam et rencontrer les acteurs locaux. Cette infrastructure, construite entre 1984 et 1988 grâce à une coopération entre le Sénégal et la Chine pour un coût initial de 6 milliards de FCFA, vise à bloquer la remontée des eaux salées, à dessaler les terres et à sécuriser la production agricole en Casamance. Cependant, après plus de 27 ans d’existence et des investissements supplémentaires de plus de 10 milliards de FCFA, les résultats restent décevants, suscitant la grogne des populations locales.
Le barrage d’Affiniam, situé sur le marigot de Bignona (66 km de long, bassin versant de 620 km²), devait permettre la mise en valeur de 11 480 hectares de bas-fonds, dont 5 600 hectares sont envahis par la salinisation. L’objectif était de maîtriser les eaux de ruissellement, d’améliorer la production agricole, de générer des revenus pour les producteurs et de limiter l’exode rural. Mais, comme l’a reconnu le ministre, les impacts escomptés ne sont pas au rendez-vous, malgré les efforts financiers de l’État.
Face à ces défis, Mabouba Diagne a annoncé un investissement de 4 milliards de FCFA dans le cadre du Projet de Développement des Cultures Vivrières et de Résilience (PDCVR). Ce projet vise à mettre en valeur 3 000 hectares de terres pour une production annuelle de 6 000 tonnes de paddy, soit 3 960 tonnes de riz blanc, de quoi nourrir environ 36 000 personnes. Des activités horticoles sur 1 200 à 1 500 hectares, incluant des cultures à haute valeur ajoutée comme les carottes, pommes de terre et tomates, devraient générer un bénéfice net de 4 à 5 millions de FCFA par hectare, soit environ 4 milliards de FCFA au total. « Notre ambition est claire : faire d’Affiniam un hub agricole, un modèle de réussite pour toute la région et au-delà », a affirmé le ministre.
Pour atteindre ces objectifs, le ministre propose plusieurs mesures : la construction de digues anti-sel et de retenue, l’installation de forages avec systèmes solaires pour sécuriser l’accès à l’eau, et la création de coopératives d’utilisation de matériels agricoles (CUMA) équipées de tracteurs, motoculteurs et moissonneuses-batteuses. Ces initiatives visent à optimiser l’exploitation des terres et à garantir une transformation agricole durable et inclusive.
Le cadre de concertation sur le barrage d’Affiniam a profité de cette visite pour formuler des requêtes : une étude d’impact environnemental, l’ouverture de l’embouchure du bras du fleuve et l’organisation d’un conseil interministériel. Ces demandes, qui seront étudiées par le ministère, font écho à des préoccupations plus larges. Une étude publiée dans l’International Journal of Biological and Chemical Sciences a révélé que la mangrove autour du barrage a régressé de 55,58 % entre 1986 et 2010, en partie à cause de la construction de l’ouvrage, qui a perturbé l’écosystème en amont et en aval. Ce constat souligne l’urgence d’une gestion plus durable pour concilier développement agricole et préservation environnementale.