Ballon d’Or : quatre changements pour l’histoire

Pour gagner en cohérence, en lisibilité et en clarté, plusieurs évolutions vont intervenir dans le Ballon d’Or. À commencer par le calendrier, qui s’appuiera désormais sur celui des saisons de football.

(Renaud Didierjean)

Né avec l’insouciance d’un pari sans lendemain destiné à surtout animer les pages d’un journal en fin d’année, le Ballon d’Or est toujours là, soixante-six ans après. Avec le même triptyque simplissime : un règlement, un jury de journalistes et un trophée. Certes il a pu – et dû – évoluer pour élargir son spectre européen initial. En 1995, d’abord, en s’étendant aux joueurs du monde entier évoluant dans un Championnat européen. Puis en 2007 pour une ouverture totale, sans distinction de nationalité ni de territoire.

Et en 2018 avec la création du Ballon d’Or féminin. Des évolutions majeures qui ont permis au BO de s’ancrer à chaque fois un petit peu plus et un petit peu mieux dans les réalités du football contemporain. Le BO n’est pas une nature morte. C’est même une matière très vivante. Qui doit constamment réussir le grand écart entre la tradition et la modernité. Question de survie, de crédibilité, de légitimité et d’attractivité. Rien que ça. Mais surtout ça. Aussi, il nous est apparu cette année que le Ballon d’Or se devait d’évoluer. Pour toujours mieux se renouveler. Ça pourrait être perçu comme une réponse à des critiques, parfois pertinentes. Mais il s’agit surtout d’une volonté affirmée, après soixante-cinq éditions, de sans cesse veiller à l’irréprochabilité et l’exemplarité du trophée.

Parfois engoncé dans quelques habitudes un peu surannées, le Ballon d’Or se propose une petite cure de jouvence et de légères transformations afin de rester parfaitement connecté aux exigences, aux spécificités et aux évolutions du football contemporain. Les quatre changements détaillés ci-après, et qui interviendront dès la prochaine édition, ont pour but de consolider les conditions et les principes d’une élection dont la transparence et l’équité restent les piliers.

1. Un calendrier plus cohérent

Parce qu’à l’origine la récompense a été pensée pour célébrer le meilleur joueur de l’année, depuis, aucune évolution n’est intervenue à ce niveau-là. Le BO célèbre le plus fort de janvier à décembre, ce qui oblige, de facto, à juger et jauger deux demi-saisons – janvier-juillet et août-décembre (assorti parfois de changements de club en intersaison) – plutôt qu’une saison dans sa globalité et sa continuité.

Aussi, en procédant à un léger décalage dans le temps, avec un abandon du rythme calendaire et un alignement du BO (hommes et femmes) sur la saisonnalité classique du foot – du mois d’août, qui coïncide avec l’entame des championnats majeurs et des tours préliminaires européens, au mois de juillet suivant qui correspond au baisser de rideau de toutes les compétitions, nationales et internationales, sélections incluses – on aboutit à une clarification des performances à comptabiliser et à évaluer. La prochaine édition prendra donc en compte l’intégralité de la saison 2021-22 qui se terminera avec l’Euro féminin (6-31 juillet 2022). La Coupe du monde au Qatar (21 novembre-18 décembre 2022) intègrera en revanche l’édition du Ballon d’Or 2023.

2. Des listes encore plus solides

Parce que le Ballon d’Or débute dès l’élaboration des fameuses listes de nommés (trente pour les hommes, vingt pour les femmes et dix pour les Trophées Yachine et Kopa), il a été décidé de renforcer cette étape essentielle. Afin de présenter une sélection de prétendants la plus juste, indiscutable et pertinente possible, a-t-on acté de faire évoluer le process qui, jusqu’alors, impliquait surtout la rédaction de France Football. Aux listes des journalistes de FF (et de L’Équipe) viendront désormais s’ajouter celles de l’ambassadeur du BO Didier Drogba (pour le BO hommes et les Trophées Yachine et Kopa) ainsi que celle du votant qui se sera montré le plus perspicace lors de l’édition précédente.

Chez les hommes, pour la prochaine édition, ce sera le Vietnamien Truong Anh Ngoc (The Thao & Van Hoa), lequel a donné le quinté exact comme le Néo-Zélandais Gordon Watson (OFC TV), toutefois moins pertinent sur le Trophée Yachine. Chez les femmes, ce sera à la jurée tchèque Karolina Hlavackova (Ruik), la seule à avoir donné le bon podium, de livrer ses vingt postulantes. De ces listes plurielles naîtront les listes officielles définitives qui seront dévoilées au mois de septembre.

Didier Drogba, ambassadeur du Ballon d'Or, participera à la constitution des listes. (PAQUOT BAPTISTE/L'Équipe)

3. Un mode de scrutin plus exigeant

Parce que le Ballon d’Or est passé de seize jurés européens (1956) à cent-soixante-dix (2021) répartis dans le monde entier, il peut s’enorgueillir d’une universalité épatante et incontestable. C’est ce qui participe à son rayonnement et sa réputation. Pour autant, le jugement est-il dix fois plus fin et meilleur avec dix fois plus de jurés ? Le gigantisme du jury ne pouvait-il pas finir par le fragiliser ? L’ouverture aux « petits » pays (ceux qui n’ont ni une grosse culture foot naturelle ni une légitimité historique et des accès pas toujours évidents aux images des principales compétitions) ne risquait-il pas de temps à autre de parasiter le scrutin, faute d’une connaissance ou d’une expertise à la hauteur ?

Comme il n’est pas question d’abandonner le principe démocratique fondateur (toutes les voix se valent, quel que soit le pays), l’idée est donc de circonscrire le jury à une « élite », à de vrais connaisseurs. Ainsi, seuls les représentants des cent premiers pays au classement FIFA (et les cinquante pour les femmes) seront « qualifiés » pour voter. Un resserrement qui renforce le niveau d’expertise et limite les (rares) votes fantaisistes. Ce qui sera perdu en pittoresque sera gagné en légitimité et en fiabilité.

4. Un règlement plus clair

Parce que le règlement n’a pas beaucoup évolué depuis son origine et que les critères donnent fréquemment lieu à des débats, il nous est apparu opportun de rafraîchir la hiérarchie des éléments constitutifs au vote pour davantage de cohérence et de clarté. Et éviter les éventuelles ambiguïtés. Le Ballon d’Or est une récompense individuelle. Aussi, logiquement, le critère numéro 1 s’attachera en priorité aux performances individuelles et au caractère décisif et impressionnant des prétendants.

Puisque le football reste malgré tout un sport collectif, le critère numéro 2 s’intéressera aux performances collectives et au palmarès accumulés au cours de la saison. Enfin, le critère numéro 3 concernera la classe du joueur et son sens du fair-play. Parce que l’exemplarité compte aussi. Les plus attentifs auront remarqué la disparition du critère « carrière du joueur ». Une manière de considérer la course au Ballon d’Or comme une compétition ouverte, et non comme une chasse gardée.

Source: l’équipe.fr

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