CHRONIQUE DU JOUR: Avec les effets du couvre-feu et de l’état d’urgence, beaucoup de personnes trouvent qu’elles n’ont pas grand-chose à faire et le temps est parfois trop long pour eux. Pourtant, ils pourraient l’occuper (ce temps) en revisitant toute la production filmique sénégalaise et redécouvrir les comédiens, metteurs en scènes et réalisateurs qui ont planté les jalons de ce qui fait aujourd’hui notre fierté.
La conséquence première de l’entrée de la pandémie au Sénégal a été l’instauration d’un couvre-feu et l’état d’urgence. Il y a également eu la fermeture des écoles, l’arrêt des activités commerciales des marchés à partir de 16-H, si ce n’est la fermeture complète de certains commerces. Tout ceci a été accompagné par une quasi inactivité d’une frange importante de la population qui reste chez elle avec pour maître-mot le respect des consignes de prévention, notamment les mesures barrières. La plus marquante est la distanciation sociale qui est d’une importance capitale mais entraîne aussi une sorte d’oisiveté qu’il convient de combler par des activités ludiques mais utiles.
Ces moments de presque oisiveté peuvent aussi être utilisés pour découvrir le patrimoine culturel, surtout cinématographique et télévisuel. Ainsi, on se rend compte que les metteurs en scène ont beaucoup travaillé. C’est aussi le moment de revisiter les classiques, en revoyant les films d’Ousmane Sembène les plus célèbres, ou encore ceux de Djibril Diop Mambety, Moussa Sène Absa, Bouna Médoune Sèye, etc. Cela nous donnera l’occasion de revoir des icones du cinéma sénégalais, pour ne pas dire africains comme Omar Seck, Makhouradia Guèye, Baay Peul, Abou Camara, Joséphine Diatta, Thierno Ndiaye Doss, Awa Sène Sarr, Joséphine Zambo, Rokhaya Niang, entre autres monuments.
Cette période peut aussi être mise à profit pour nous rappeler les téléfilms communément appelés théâtre comme les séries télévisuelles qui ont fait le bonheur des Sénégalais comme Un Dg peut en cacher un autre, Badou meune lepp mais aussi les pièces qui ont fait date comme Fatou la Bonne particulière, Sama allumette, Nafi, etc. réalisés par des troupes de passionnés comme Daaray Kocc ou Jamoney Tey qui ont tracé la voie aux troupes qui font l’actualité maintenant. Il y a eu de grands réalisateurs comme Cheikh Tidiane Diop, Pape Demba Ndiaye, Babacar Ba, Daouda Guissé de la Troupe de Saint-Louis ou encore Macodou Mbengue. C’est aussi une occasion de revoir avec plaisir les artistes Alioune Badara Diagne Golbert, Mansour Seck, Babou Faye, Ibou Laye, Adja Lat Degueune Samb, Ndèye Mour Ndiaye, Marie Madeleine, Cheikh Seck, Doudou Diop dit Loulou, Massamba Thiam Gueye et toutes ces autres stars de la télévision sénégalaise qui ont marqué de leur encre indélébile la télé au Sénégal. Ces derniers avaient montré qu’on pouvait aussi faire du comique sans avoir nécessairement recours à l’obscène, à l’insulte.
Ce théâtre qui a démarré avec le théâtre radiophonique dont le pionnier est sans conteste ElHadji Abdoulaye Seck qui avait lancé la série radiophonique Makhouradia Gueye Chauffeur de Taxi avait également une grande vocation orientée vers l’éducation des masses à travers la dénonciation des tares de la société pour changer les mœurs. Il a aussi eu à remettre au goût du jour le théâtre historique qui a repris les grands moments de l’histoire du Sénégal.
La dextérité des réalisateurs de cette époque a conduit même à tenter et à réussir l’adaptation de classiques de la littérature sénégalaise comme La Collégienne (adaptation du roman éponyme de Marouba Fall), Bataxal bu gudd (adaptation d’Une si longue lettre de Mariama Bâ) ou encore Wallu wa alahira ou Le Revenant d’Aminata Sow Fall. Ce qui était une prouesse pour ces gens qui, pour la plupart, n’avaient pas fait d’école de théâtre autre que la troupe dans laquelle ils étaient enrôlés.
Manque d’activité certes, mais on peut se créer ses propres activités et renouer avec ceux qui ont fait, pendant plusieurs décennies, le bonheur des Sénégalais.
Pr Mamadou DRAME
GMS