Ajay Banga, de la vie de garnison en Inde aux portes de la Banque mondiale

En choisissant jeudi de proposer la candidature d’Ajay Banga à la présidence de la Banque mondiale (BM), le président américain Joe Biden a fait le choix d’un profil atypique pour cette institution, dirigée souvent par des hommes au long passé politique à Washington.
 
L’homme d’affaires indo-américain de 63 ans ne remplit pas formellement les attentes de la BM, qui incitait, la veille, les Etats membres à promouvoir en particulier les candidatures de femmes.
 
Mais par bien des égards, son choix souligne une volonté de la part de la Maison-Blanche de faire un geste vers les pays émergents, en proposant une personne qui est née, a grandi et a été éduquée dans l’un des plus grands pays au monde: l’Inde.
 
« Je pense qu’avoir quelqu’un capable de parler à différentes identités et aux différentes parties prenantes est absolument essentiel », souligne Clemence Landers, chercheuse au Centre de développement mondial.
 
Car Ajay Banga, désormais Américain, a connu une première vie dans le sous-continent indien.
 
Né à Pune, dans l’Etat indien du Maharashtra (centre), au sein d’une famille de la minorité religieuse sikh, Ajay Banga a régulièrement déménagé durant son enfance, au gré des affectations de son père, militaire, qui terminera sa carrière avec le grade de général de corps d’armée.
 
Il y poursuivra également ses études, d’abord au St Stephen’s College de New Delhi puis à l’Institut indien de management d’Ahmedabad, l’une des meilleures écoles de commerce d’Asie, avant d’y débuter sa carrière, au début des années 1980, dans les filiales locales de grands groupes agroalimentaires, Nestlé puis PepsiCo.
 
Ajay Banga bascule vers la finance à la fin des années 1990, en rejoignant la banque américaine Citigroup, et se retrouve chargé, entre 2005 et 2009, du développement de la stratégie de micro-financement du groupe bancaire.
 
– Donner des garanties –
En 2009, il rejoint Mastercard comme directeur des opérations avant d’en devenir le directeur général un an plus tard, puis président du conseil d’administration en 2021.
 
« Il a une approche assez unique. Sa vision des choses était réellement de trouver de la croissance par l’inclusion financière, en particulier dans les pays émergents », détaille Luis Alberto Moreno, ancien président de la Banque interaméricaine de développement (BID), qui a noué des partenariats notamment avec Mastercard.
 
S’il est désigné à la tête de l’institution, Ajay Banga sait d’ores et déjà qu’il sera attendu sur deux aspects essentiels: la réforme du groupe Banque mondiale, que les Etats-Unis veulent mener, et le financement de la lutte contre le réchauffement climatique, en particulier pour les pays pauvres et émergents.
 
D’autant que la question climatique est certainement l’une des raisons qui ont poussé le président sortant de la BM, David Malpass, à annoncer le 15 février son départ de l’institution, un an avant la fin de son mandat.
 
Nommé par le président Donald Trump, David Malpass a dû faire face au scepticisme quant à sa volonté de prendre les questions climatiques au sérieux, l’ancien vice-président américain Al Gore n’hésitant pas à l’accuser d’être climatosceptique. Autant dire que son successeur sera attendu au tournant sur ces questions.
 
Ajay Banga devra aussi gérer les demandes des pays émergents, en particulier la Chine, l’Inde, la Russie et le Brésil, qui souhaitent depuis plusieurs années voir leur rôle augmenter au sein des institutions internationales.
 
Des défis pour lesquels Ajay Banga est la personne idoine, estime David Beasley, directeur exécutif du Programme alimentaire mondial (PAM).
 
« Il sait être direct, ne pas tourner autour du pot, et en même temps être incroyablement diplomate. Compte tenu des nombreux problèmes partout dans le monde, nous avons besoin de quelqu’un avec sa maturité et son expérience », assure-t-il.
 

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